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L’onction des malades : « une force pour vivre » (25 avril)

    Dimanche 25 avril, 18 personnes ont reçu le sacrement des malades, dans l’église St Pierre, au cours de la messe célébrée par le P.Antoine Nouwavi. Il a souligné l’importance de la visibilité et du sacrement donné dans le temps Pascal faisant ainsi le lien avec la résurrection du Christ.
    – L’imposition des mains évoque l’Esprit de Dieu Ressuscité. Un des gestes par lesquels Jésus accueille, guérit et pardonne.
    -L’onction d’huile sur le front, siège de la pensée, et sur les mains elle symbolise le travail et le relationnel de nos vies.
    Le célébrant a nommé chacune par son prénom et dit cette prière : Par cette Onction Sainte, que le Seigneur en sa grande bonté vous réconforte par la grâce de l’Esprit-Saint. Vous ayant libéré de tout péché et de tout mal, qu’il vous sauve et vous relève.
     Puis, chaque accompagnateur a reçu un cierge qui a été allumé au cierge Pascal rappel du Christ Ressuscité.
    La célébration s’est terminée par ce beau chant « Sous son voile de tendresse » confiant ainsi la communauté paroissiale  à la Vierge Marie.

    homélie du dimanche 25 avril par le P.Nouwavi

    Bien chers amis,

    Il était nécessaire que nous puissions nous retrouver à St Pierre, dans la Maison de Pierre avec nos frères et sœurs affectés dans leur corps, leur cœur et leur âme.

    Dans les évangiles, une des guérisons faites par Jésus a eu lieu dans la famille de Pierre : « Comme Jésus entrait chez Pierre, dans sa maison, il vit sa belle-mère couchée avec de la fièvre. Il lui toucha la main, et la fièvre la quitta. Elle se leva, et elle le servait » (Mt 8, 14-15).

    Notre assemblée de ce matin a lieu dans ce contexte épidémique, hélas pas encore fini…

    Il y a un an, jour pour jour, confinée notre ville devait faire face aux ravages du coronavirus. Le virus a pu rentrer dans une des maisons de retraite de notre ville. Quelques malades, des morts…

    Chaque fois que mon téléphone sonnait en affichant le nom de cette belle maison de retraite, dans une certaine peur de ce virus à l’époque moins connu qu’aujourd’hui,  je courais quand même donner le Sacrement des malades.

    La peur, l’incertitude face à l’avenir nous habitent encore. Il est nécessaire que nous puissions nous retrouver ensemble ce matin autour de nos frères et sœurs affectés dans leur corps, leur cœur et leur âme.  

    Dans l’incertitude face à l’avenir, nous voici réunis ensemble. Notre rassemblement de ce matin, je l’analyse comme une sorte de catharsis.

    Dans la maison de Pierre, nous portons ensemble les mêmes maux, les mêmes peines, les mêmes douleurs, les mêmes angoisses. Etant ainsi regroupés, nous sommes par le fait même libérés et orientés vers un autre horizon. Il s’opère ainsi un transfert d’horizon : de la peur, nous voici orientés et fondés dans l’espérance

    Plus profondément, que faisons-nous là ? Dans le silence de nos cœurs, l’Ecriture nous aide à faire de nos silences une parole. Ecoutons-là :

    « Au terme des cinquante jours, ils se trouvaient réunis tous ensemble.

     Soudain un bruit survint du ciel comme un violent coup de vent : la maison où ils étaient assis en fut remplie tout entière.

     Alors leur apparurent des langues qu’on aurait dites de feu, qui se partageaient, et il s’en posa une sur chacun d’eux.

     Tous furent remplis d’Esprit Saint » (Ac 2, 1-4).

                Nous célébrons donc un peu avant l’heure l’événement de l’effusion fondamentale qui nous relève, nous réhabilite et nous tourne vers l’horizon de la grâce. Nous ne vivons pas cette effusion dans une sorte de spiritualité exaltée qui oublie nos maux, nos douleurs et nos angoisses.

                Au cœur de la grâce exceptionnelle que le Christ nous fait, nous venons lui présenter ce que nous sommes, ce que nous ressentons, ce que nous redoutons de l’avenir proche et lointain.

                Nous voici chers amis, face au Christ !

                Face au Christ, dans la Pentecôte qui est la nôtre, nous venons déverser nos plaintes sur la maladie, le mal-être de notre monde et les injustices de toute sorte.

                Face au Christ, nous sommes reconnus dans ce qui nous affecte dans notre cœur, notre corps et notre âme. Le Serviteur souffrant de Livre d’Isaïe n’est plus une fiction :

    Qui aurait cru ce que nous avons entendu ? Le bras puissant du Seigneur, à qui s’est-il révélé ?

                Devant lui, le serviteur a poussé comme une plante chétive, une racine dans une terre aride ; il était sans apparence ni beauté qui attire nos regards, son aspect n’avait rien pour nous plaire.

     Méprisé, abandonné des hommes, homme de douleurs, familier de la souffrance, il était pareil à celui devant qui on se voile la face ; et nous l’avons méprisé, compté pour rien.

     En fait, c’étaient nos souffrances qu’il portait, nos douleurs dont il était chargé. Et nous, nous pensions qu’il était frappé, meurtri par Dieu, humilié.

     Or, c’est à cause de nos révoltes qu’il a été transpercé, à cause de nos fautes qu’il a été broyé. Le châtiment qui nous donne la paix a pesé sur lui : par ses blessures, nous sommes guéris (Is 53, 1-5)

                Pour les croyants que nous sommes, la souffrance, la maladie deviennent finalement dans le Christ un chemin initiatique d’une co-reconnaissance inouïe : ses souffrances nous précèdent, il se reconnait dans la dramatique humaine, et nous sommes reconnus dans la pauvreté de notre état. Dans cet état, comme le suggère St Augustin,  nous lui offrons notre pauvreté et lui en retour, dans la puissance de la résurrection, nous sauve et nous relève.

                Face au Christ ! Que dire ? La souffrance nous ôte toute parole, nous perdons notre latin !

    Dans l’humilité de notre être, nous pouvons encore balbutier quelques mots.

     Pour nous, le gage de l’espérance au cœur de la maladie, la souffrance, demeure le Christ lui-même. La souffrance et la déchéance sont figures du Christ souffrant et abandonné. Notre maladie est aussi le lieu où le Christ souffre dans son corps. Notre état, peut-on dire,  est la figure du corps encore souffrant de Jésus le Christ, un corps souffrant mais en attente de rédemption. Ainsi, on peut le dire, le Christ nous rejoint dans la crise, la souffrance et la déchéance. Le Christ rejoint, en effet, l’homme au point où tout est perdu parce que pour lui-même, tout semblait perdu : « N’es-tu pas le Christ ? Sauve-toi toi-même, et nous aussi » dit, en effet, un des malfaiteurs cloués à la croix avec Jésus (Lc 23, 39).

    Le geste sauveur du Christ ne relève pourtant pas de la magie. Avec lui, on découvre que le lieu même de la déchéance et de la perte absolue devient le lieu du dépouillement absolu. Un dépouillement qui purifie, qui libère de toutes les puissances sur lesquelles on aurait pu compter. C’est évidement l’expérience qu’a faite Job quand il s’est écrié : « nu, je suis sorti du sein maternel, nu j’y retournerai » (Jb 1, 21). Le temps de nos crises, et de la déchéance est à coup sûr le temps de la nudité mais assurément le temps où, dans le Christ, Dieu est sauveur parce qu’il est créateur à partir de rien, c’est-à-dire, à partir de sa seule volonté et de son amour qui appellent à être.

    Bien chers amis, dans le face-à-face avec le Christ auquel nous soumettent la souffrance et la maladie, nous sommes finalement et heureusement un avec le Christ.

    Avec Lui, nos maux portés par la communauté paroissiale ne nous cantonnent plus dans la solitude de notre moi.

    Avec le Christ, qui nous soigne ce matin par la grâce du sacrement de la vie donné à tous ceux qui le sollicitent, nous sommes pardonnés, relevés et sauvés.

    Par les gestes de l’imposition et de l’onction de l’huile, il nous dit : « Voici que je fais toute chose nouvelle, ne le voyez-vous pas ! » (Ap 21, 5)

    Abbé Antoine Nouwavi,
    Curé-Doyen des Sables