Les paraboles que Jésus déploie avec art dans l’extrait de l’évangile dit de la brebis égarée (Mt 18,12-13 et Lc 15,3-7) permettent de mieux comprendre l’espérance qui est celle des fils et des filles de Dieu que nous sommes.
Les évangiles ont certainement réussi à nous faire saisir la grande mansuétude du cœur de Dieu. Une des images les plus marquantes de la littérature évangélique est certainement celle de la figure du Père qui, malgré l’incurie du Fils prodigue, ouvre largement les portes de sa maison, l’accueille, l’ennoblit malgré son attrition. Le Dieu de Jésus le Christ est celui qui fait bon accueil à tous ces fils qui reviennent vers lui, même pour des raisons purement alimentaires.
Au cœur de nos déchéances, luit l’espérance du salut comme si elle nous collait à la peau. Fort de cette certitude, St Paul avait déjà révélé : « Ma grâce te suffit, car ma puissance donne toute sa mesure dans la faiblesse. C’est donc très volontiers que je mettrai plutôt ma fierté dans mes faiblesses, afin que la puissance du Christ fasse en moi sa demeure » (1co12, 9).
Si telle est l’espérance des faibles, qu’en est-il de celle des étourdis ? L’évangile dit de la brebis égarée nous donne quelques éléments pour penser la psychologie de cette pauvre bête. Pourquoi n’a-t’elle pas suivi le groupe ? Etourdie, tête en l’air, libertaire, la brebis égarée a préféré suivre son chemin personnel. C’est certainement le type de personnalité qui se rapproche de celui des personnes qui, tempête sous un crâne, préfèrent suivre leur propre route. Individualistes peut-être, elles détestent de faire partie d’un groupe, rejettent l’Église institutionnelle pour se créer une spiritualité qui est, en fait, un véritable pot-pourri.
L’évangile est clair : si le chemin du salut réside dans l’application et l’abandon de soi à demeurer dans la bergerie et à se laisser paître par le Bon Berger, il existe, toute de même, une sorte de traitement de faveur pour les étourdis et les libertaires. Pourtant, St Luc qui ne laisse entrevoir aucune prime à l’isolement et à l’étourdissement, suggère par contre, qu’ils suscitent dans le cœur du Bon Pasteur, tristesse, angoisse et sentiment d’incomplétude.
Une certitude naît de la méditation de cet évangile : « La joie dans le ciel devant les anges de Dieu » est l’autre nom du salut que nous propose St Luc. Il y a ici chez cet évangéliste une audace théologique qu’explicitera plus tard st Augustin dans le thème du « Christ-Total »: Jésus le Christ ne se satisfait pas qu’un seul d’entre nous soit hors de la maison du Père. Son cœur de Fils, premier-né de toute créature (Col 1, 15) est inquiet tant que le dernier de ses frères en humanité n’est pas encore rentré dans la maison du Père.
Abbé Antoine Nouwavi,
Curé-Doyen des Sables